Airbnb, un concurrent déloyal ?
La plateforme Airbnb est devenue ces dernières années un acteur incontournable de l’industrie touristique. Cependant, son succès grandissant suscite de nombreuses critiques et soulève des interrogations quant à son impact sur le marché immobilier.
En effet, Airbnb est accusé de favoriser la location de courte durée au détriment de la location traditionnelle. De nombreux propriétaires préfèrent louer leur logement sur la plateforme plutôt que de le mettre sur le marché de la location longue durée. Cette pratique a pour conséquence de retirer des appartements et des maisons du marché, privant ainsi les résidents de logements permanents.
Les propriétaires sont attirés par les avantages financiers de la location sur Airbnb. Les revenus générés sont bien supérieurs à ceux d’une location classique. Une chambre louée 30 jours par mois à Chamonix peut rapporter en moyenne 4 260 euros, et jusqu’à 7 170 euros pour un logement indépendant. De plus, les tarifs peuvent varier en fonction des saisons, offrant ainsi une plus grande flexibilité financière par rapport aux locations traditionnelles soumises à des contraintes légales.
En outre, Airbnb bénéficie d’un avantage fiscal important avec un abattement sur les revenus de 71 %, jusqu’à un certain seuil. Ce traitement fiscal avantageux est bien plus avantageux que celui accordé aux locations annuelles.
La situation est encore plus préoccupante avec l’entrée en vigueur progressive de la loi Climat et Résilience, qui vise à éradiquer les passoires thermiques. Cette mesure entraînera le retrait progressif des logements classés F et G de la location traditionnelle. Cependant, cette contrainte ne s’applique pas aux logements proposés sur Airbnb, ce qui risque d’accentuer encore davantage le phénomène de retrait des logements du marché de la location longue durée.
Face à cette situation, certaines régions ont décidé de s’attaquer au problème en augmentant la construction de nouveaux logements. Cependant, cette politique est vivement critiquée par certains experts qui estiment que la construction de nouveaux logements ne fait que favoriser la spéculation immobilière, sans résoudre réellement le problème de pénurie de logements pour les résidents.
À Chamonix, par exemple, la municipalité a mis en place une mesure dans son plan local d’urbanisme (PLU) qui oblige les nouvelles constructions de plus de 300 m² à consacrer 20 % de leur surface à l’habitat permanent. Une proposition est même à l’étude pour augmenter cette surface à 50 % dès 200 m². Cependant, certains élus estiment que cette mesure est insuffisante et qu’il est nécessaire de réglementer davantage les plateformes de location de courte durée.
La question de la rénovation du parc immobilier existant se pose également avec l’entrée en vigueur de la loi Zéro artificialisation nette (ZAN) pour 2050. Le rythme de la bétonisation doit être réduit de moitié d’ici 2031 avant d’être totalement arrêté en 2050. Dans ce contexte, le maire de Chamonix, Éric Fournier, affirme prendre la question de la rénovation énergétique au sérieux et propose des mesures incitatives pour encourager les propriétaires à réhabiliter leur logement.
Au niveau national, certains élus réclament une régulation plus stricte des plateformes de location de courte durée. Ils demandent notamment la suppression de la niche fiscale dont bénéficie Airbnb et l’interdiction de la location de logements classés comme passoires thermiques sur les plateformes touristiques. Ils souhaitent également accorder aux collectivités locales un pouvoir de régulation plus important pour trouver un équilibre entre les politiques du tourisme et du logement.
En attendant, une mesure vient d’être adoptée autorisant une majoration de la taxe d’habitation pour les résidences secondaires dans certaines communes, dont Chamonix.